L'acrylamide, un composé chimique formé lors de cuissons à haute température comme la friture et la pâtisserie, suscite des inquiétudes sanitaires mondiales en raison de ses effets potentiellement cancérigènes et neurotoxiques. Ce composé est issu de la réaction de Maillard entre les sucres réducteurs et l'asparagine, un acide aminé naturellement présent dans la pomme de terre. La pomme de terre étant la troisième culture vivrière du Bangladesh et largement utilisée dans divers produits transformés, il est crucial de lutter contre la formation d'acrylamide pour la santé publique et le potentiel d'exportation du pays.
Une enquête récente portant sur 15 des 21 producteurs de produits à base de pommes de terre identifiés au Bangladesh a révélé des lacunes notables dans leur compréhension et leurs pratiques liées à l'acrylamide :
- Lacunes de connaissances: Alors que 80 % des producteurs étaient conscients de l’importance des sucres réducteurs et que 73.3 % comprenaient le rôle des acides aminés dans la qualité de la pomme de terre, 60 % ne connaissaient pas la réaction de Maillard et 53.3 % manquaient de connaissances sur la formation d’acrylamide dans les produits à base de pomme de terre.
- Pratiques d’atténuation : Seuls 16.7 % des producteurs avaient mis en œuvre des stratégies pour atténuer la formation d'acrylamide. Aucun n'a effectué d'analyses spécifiques pour l'acrylamide en raison de l'absence de politiques normalisées ou d'exigences réglementaires.
- Pratiques de traitement : Une majorité significative (83.3 %) a frit des pommes de terre à des températures comprises entre 150 et 200 °C, tandis que 16.7 % ont dépassé cette fourchette, malgré des données montrant que des températures plus élevées augmentent considérablement les concentrations d'acrylamide. De plus, seulement 60 % ont mesuré des concentrations de sucres réducteurs dans les pommes de terre crues, un précurseur essentiel de la formation d'acrylamide.
Ces résultats concordent avec d'autres recherches indiquant la présence d'acrylamide dans des aliments riches en glucides traités thermiquement au Bangladesh. Par exemple, une étude a détecté des concentrations d'acrylamide de 730 ± 293 μg/kg dans des chips et de 679 ± 285 μg/kg dans des frites, certains échantillons dépassant les niveaux de référence fixés par la Commission européenne.
Stratégies d'atténuation :
Pour réduire la formation d’acrylamide dans les produits à base de pomme de terre, les producteurs peuvent adopter plusieurs stratégies efficaces :
- Interventions de prétraitement : Tremper des tranches de pommes de terre dans de l'eau froide pendant 15 à 120 minutes peut réduire la formation d'acrylamide de 42 à 89 % dans les produits poêlés et jusqu'à 47 % dans les frites. Un blanchiment à l'eau chaude à 60-80 °C pendant 5 à 15 minutes a permis d'obtenir des réductions allant jusqu'à 97 %, selon la température et la durée.
- Modifications de cuisson : L'utilisation de méthodes de cuisson telles que la cuisson à la vapeur ou à l'eau bouillante, pratiquées à des températures inférieures à 120 °C, peut prévenir la formation d'acrylamide. Il a également été démontré que la friture à l'air libre produit des niveaux d'acrylamide inférieurs à ceux de la friture, notamment lorsqu'elle est associée à des méthodes de prétraitement comme le trempage ou le blanchiment.
- Ajustements des ingrédients : L’incorporation d’acides doux comme l’acide citrique dans les solutions de trempage peut considérablement réduire le pH, inhibant ainsi la réaction de Maillard et réduisant les niveaux d’acrylamide jusqu’à 97 %.
- Technologies innovantes : La combinaison de méthodes de cuisson traditionnelles avec des technologies innovantes comme le chauffage infrarouge ou la friture assistée par micro-ondes s'est avérée prometteuse pour réduire les niveaux d'acrylamide tout en préservant la texture et la saveur.
L'étude souligne l'urgence de mettre en place des pratiques normalisées et des cadres réglementaires pour lutter contre la formation d'acrylamide dans l'industrie de transformation de la pomme de terre au Bangladesh. La mise en œuvre de programmes de formation complets et de directives de transformation actualisées peut améliorer la compréhension et les pratiques des producteurs en matière de réduction de l'acrylamide. Les organismes de réglementation devraient établir des politiques de surveillance et de réduction des concentrations d'acrylamide dans les aliments transformés, en s'alignant sur les normes internationales. Ces mesures amélioreront non seulement la santé publique, mais ouvriront également des perspectives d'exportation en garantissant le respect des normes mondiales de sécurité alimentaire.